Au VIIIème siècle, les évêques de Rome justifièrent les Etats de l'Eglise à l'aide d'un faux mythique: - Le pseudo acte de donation de Constantin.

Ils tentèrent de faire admettre que l'Empereur Constantin (+337) avait jadis donné à l'un de leur prédécesseur les célèbres Etats pontificaux (qui se limitent aujourd'hui au 44 hectares du Vatican, mais qui englobèrent pendant des siècles toute la partie centrale de l'actuelle Italie).
Cette "donation" assimilait l'évêque de Rome à un véritable souverain. En même temps, elle préparait le terrain pour la prochaine étape.

Au IXème siècle, les promoteurs du centralisme romain eurent encore recours à des faux: - Les fausses Décrétales (ou décrétales isidoriennes, du nom de leur auteur, Isidorus Mercator), forgées de toutes pièces vers 850 afin de soumettre les évêques au pouvoir de Rome en affirmant mensongèrement que le pontife latin a depuis le début du christianisme une primauté de juridiction sur l'Eglise tout entière.

Les canonistes romains s'en serviront ensuite pour justifier la doctrine de la primauté de droit divin du pape et de l'infaillibilité de son magistère, doctrine qui sera érigée en dogme lors du concile Vatican 1 en 1870.

Il est évident que c'était faire fi de la tradition patristique et conciliaire ! Certes, le 4ème concile oecuménique (Chalcédoine - 451) avait bien reconnu à l'évêque de Rome le premier rang d'honneur parmi les quatre autres patriarches, mais en ajoutant expressément que cette primauté d'honneur lui avait été attribuée (canon 28) "parce que Rome était la ville régnante..." comme ancienne capitale de l'Empire...

Du reste, et nous sommes là au VIIème siècle, l'un des plus illustre évêque de Rome, le pape Saint Grégoire le Grand (Lib.V Epist.18 - Lib.VIII Epist.30) n'hésitait pas à déclarer au patriarche Jean d'Alexandrie que le titre d'évêque universel (et alors il ne s'agissait encore que d'un qualificatif honorifique) est "extravagant, orgueilleux, impie, cause de division dans l'Eglise".
Il ne souffrait pas qu'on lui décernât un "titre aussi criminel et blasphématoire envers Dieu". Le patriarche Jean l'ayant appelé évêque universel, il lui répondit sur le champ: "Je vous en prie, ne donnez jamais ce nom à personne; mais rendons grâce à Celui qui a fait de tous les hommes un seul troupeau, sous un seul pasteur, qui est Lui-Même".
"Quiconque, disait-il en une autre circonstance, s'appelle évêque universel ou désire ce titre est, par son orgueil insensé, le précurseur de l'Antéchrist." Qu'eut-il dit s'il se fut trouvé au concile Vatican 1 de 1870 ?

Comme l'on pouvait s'y attendre, la recherche et l'instauration du pouvoir absolutiste romain allaient produire la première grande cassure de l'Eglise.
Vers 1054, l'Est et l'Ouest se séparèrent. L'attachement des Eglises d'Orient aux grands principes qui avaient présidé au développement des institutions chrétiennes ne pouvait s'accommoder de la dérive dominatrice du siège latin.

De plus, l'évêque de Rome avait au mépris de la tradition ecclésiale modifié le Symbole de la Foi (texte du credo de Nicée-Constantinople).
Il changeait la formule: l'Esprit procède du Père - en y ajoutant - "et du Fils" (en latin filioque), contrairement aux enseignements mêmes du Christ-Jésus: "Je vous enverrai d'auprès du Père, l'Esprit de Vérité qui procède du Père" (Jean15,26).
L'Orient ne pouvait se résoudre à accepter le contournement de l'Evangile et l'atteinte aux déclarations d'un concile oecuménique.

Une fois la rupture consommée, il n'y eut plus de frein en Occident pour barrer la route au pouvoir de plus en plus tentaculaire de Rome. La mémoire de l'ancienne Constitution de l'Eglise ne subsistera guère plus qu'à travers les thèses gallicanes.


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