Les rites et supports de l'Eglise, l'imposition des mains et la pratique de certaines prières de délivrance sont des sujets que nous n'avions encore jamais fouillés et qui suscitent de nombreuses interrogations. Il en va de même pour la pratique des exorcismes dans l'Eglise. Un discernement s'impose. La ligne de notre Eglise veut être celle de l'équilibre et du bon sens. Aussi avons-nous choisi de prendre du recul pour nous laisser guider par l'esprit de sagesse et d'intelligence. Sans les lumières de la prière, il n'y a pas de bonne théologie.

Il peut paraître singulier au premier abord de voir que l'archange Raphaël incite le jeune Tobie à combattre le démon Asmodée avec le foie d'un poisson, ou à utiliser du fiel pour guérir la cécité de son père (Tobie 6,7-17-18 et 11,7).

Pourquoi Jésus utilise-t-il sa salive dans le rite de l'épheftha qui sert à la guérison du sourd-muet (Marc 7,34) avant d'être introduit par l'Eglise dans les exorcismes pré-baptismaux ?

Salive encore à Bethsaïde pour guérir un aveugle (Marc 8,22), simple attouchement à Jéricho (Mathieu 20,34) ; à Jérusalem : salive et terre pour guérir un aveugle-né (Jean 9,6)…

Les apôtres ajouteront d'autres supports : "A tel point qu'il suffisait d'appliquer sur les malades des mouchoirs ou des linges qui avaient touché son corps (Paul). Alors les maladies les quittaient et les esprits mauvais s'en allaient" (Actes 19,12).

L'huile est attestée dans Jacques 5,14.

La voie était tracée pour que les successeurs des apôtres puissent choisir d'autres supports : rameaux, eau bénite, sel béni, médailles, scapulaires, croix de Saint Jean, bougies, cierges, etc.

La force de guérison que possède Jésus et qu'il transmet aux apôtres et à leurs successeurs peut se définir comme une potentialité mise perpétuellement à la disposition de la Foi. Citons la femme hémoroïsse qui se guérit en touchant la frange du manteau de Jésus :

- "Qui est-ce qui m'a touché ? Quelqu'un m'a touché car j'ai senti une force sortie de moi" (Luc 8,46).

- "Toute la foule cherchait à le toucher parce qu'une force sortait de lui et les guérissait tous" (Luc 6,19).

L'imposition des mains

Ce rite est presque aussi ancien que l'Humanité. On le retrouve à travers toutes les époques et dans toutes les religions.

Ouvrons la Bible, le livre de la Genèse dévoile la bénédiction donnée par Jacob aux deux fils de Joseph, Ephraïm et Manassé (Genèse 48,13-14). Le livre des Nombres rappelle que Moïse transmit l'Esprit de Yahvé aux soixante-dix anciens d'Israël par imposition des mains (Nombres 11,24-25). Enfin, toujours dans le livre des Nombres, Moïse impose les mains sur l'ordre de Yavhé à Josué fils de Noun, pour en faire son successeur et lui transmettre la force du Seigneur (Nombres 27,18-23).

Le Nouveau Testament multiplie les exemples montrant Jésus et ses apôtres imposant les mains aux malades pour les guérir. Jésus transmettra ses pouvoirs aux apôtres à travers ce rite ; eux-mêmes établiront leurs successeurs de cette façon (2 Timothée 1,6). C'est l'origine de la succession apostolique, détenue par les évêques catholiques, orthodoxes, gallicans, vieux-catholiques, luthériens et anglicans. C'est à travers cette lignée de transmission des pouvoirs du Christ que s'opèrent les ordinations des clercs au sein des Eglises, qui participent ainsi au ministère de l'évêque et le prolongent à travers son diocèse.

L'Exorcistat dans l'Eglise de Dieu

La mission de délivrance et d'accompagnement spirituel opérée par l'archange Raphaël dans le livre de Tobie met l'accent sur un ministère étonnant, celui d'exorciste… Cette fonction existe encore au sein de la plupart des Eglises chrétiennes, mais elle demande beaucoup d'équilibre, de sagesse et de discernement.

Troisième ordre mineur conféré par l'évêque aux séminaristes qui se préparent au diaconat ou à la prêtrise, l'exorcistat a pour but de missionner des personnes capables de transmettre les charismes d'aide et de protection de l'Eglise.

Nous pouvons ainsi résumer son action :

- Bénir
- Imposer les mains aux malades
- Pratiquer les prières de délivrance

Prudence !

C'est dans l'Evangile de Luc et que nous trouvons la fondation de ce qui deviendra pour la future Eglise l'ordre mineur des exorcistes: "Après cela le Seigneur désigna soixante-douze autres disciples et les envoya par deux" (Luc 10,1) - "Voici, je vous ai donné le pouvoir de marcher sur les serpents et les scorpions, et sur toute la puissance de l'ennemi; et rien ne pourra vous nuire" (Luc 10,19).

L'importance de cet ordre mineur est grande, notons toutefois que ne s'y rattache pas le pouvoir de lier et de délier, partie intégrante de l'épiscopat et de son prolongement immédiat qu'est la prêtrise.

Une grande sagesse doit présider à l'exercice de ce ministère bien particulier.

Les Evangiles nous rappellent l'exigence de la prudence et de la simplicité (Mathieu 10,16); ils nous révèlent encore que l'exorciste ne doit pas axer sa pensée sur les résultats obtenus mais sur le fait que son nom est : "inscrit dans les Cieux" (Luc 10,20).

L'exercice de ce ministère est lié à un certain nombre de directives :

- Ne pas agir seul mais au moins à deux (Luc 10,1).

- L'office de prière doit être accompagné de la prédication constante de l'Evangile (Luc 10,9).

- L'exorciste doit préparer la venue du Christ (Luc 10,1), c'est à dire l'approche sacramentelle des fidèles, en s'appuyant sur la prédication et l'eucharistie (sacrements de la parole et de la communion). Il ne servirait à rien d'exorciser si l'on ne faisait rentrer le délivré dans une vie ecclésiale fervente... (Luc 11,24) nous apprend que si l'exorcisé n'est pas protégé et aidé par la suite, il aura de nouvelles attaques et son sort devient pire que la première fois.

"Etudiez-vous à rejeter de votre esprit et de votre chair toute souillure et toute iniquité, pour n'être pas vous-même esclaves de celui dont vous délivrerez les autres. Apprenez par votre charge même à commander à vos passions, pour que l'ennemi ne trouve rien à revendiquer dans votre conduite." (Extrait de la monition du rituel d'ordination).

S'il est souhaitable que l'exorcisme soit pratiqué dans les Eglises il ne doit en être ni la principale activité, ni l'obsession. Un exorciste dont l'action ne débouche pas vers des baptêmes, des premières communions, des confirmations, des assistances à la messe, des retours à la prière est un mauvais exorciste.

L'Exorcisme Face à la Science


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